DÉCRYPTAGE… Pourquoi le mot « argent » reste tabou dans la société actuelle !?

DÉCRYPTAGE… Pourquoi le mot « argent » reste tabou dans la société actuelle !?

L’argent comme marqueur de valeur sociale

Dans nos sociétés modernes, l’argent est une ressource mais pas que. Il symbolise aussi la réussite, la valeur personnelle, l’utilité sociale.

Dans l’inconscient collectif, dire “je gagne tant” revient donc indirectement à dire “voici combien vaut mon travail, ma place dans la société”. Ce lien entre argent et valeur personnelle crée immédiatement un terrain de comparaison et en découlent les questions suivantes… Suis-je assez !? Suis-je à la hauteur !? Vais-je être jugé·e !?

Résultat ! On parle d’argent uniquement quand on pense être du “bon côté” de l’échelle… et on se tait le reste du temps.

Un héritage religieux et moral très puissant

Dans l’imaginaire occidental, deux idées persistent :

  • “L’argent corrompt.”
  • “La richesse rend mauvais.”

Depuis des siècles, on enseigne que l’argent est dangereux, matérialiste, superficiel, voire impur. En France, la culture catholique a profondément marqué l’imaginaire collectif : valorisation de la modestie, méfiance de l’abondance, suspicion envers ceux qui “réussissent trop”.

Cette empreinte morale nourrit encore aujourd’hui un sentiment diffus qu’on peut avoir de l’argent, mais il ne faut pas trop en parler.

Une éducation où l’argent est rarement expliqué… mais souvent chargé

La plupart des adultes actuels ont grandi dans des environnements où :

  • On ne parlait pas d’argent à table
  • On répondait “ça ne te regarde pas”, “on verra plus tard”, “tu comprendras quand tu seras grand”
  • Les conflits familiaux étaient souvent liés à l’argent, sans être nommés

L’argent est alors devenu :

  • un terrain vague rempli de non-dits,
  • un espace émotionnel où se mélangent peur, insécurité, honte et méritocratie.

Et, par loyauté, mimétisme, l’adulte reproduit ce qu’il a vu… Silence, pudeur, parfois de la culpabilité.

Une société de l’apparence et de la comparaison permanente

Avec les réseaux sociaux, l’argent est devenu paradoxal :

  • surabondant dans les images (photos de voyages, lifestyle, luxe…)
  • absolument absent dans les conversations authentiques (revenus, dettes, gestion réelle, angoisses financières)

Ce décalage crée une pression silencieuse : tout le monde montre des signes extérieurs de réussite, mais personne n’ose dire comment il va vraiment.

L’argent touche à trois zones sensibles… La sécurité, l’identité et la dignité.

Parler d’argent revient à exposer des aspects très intimes :

  • Sécurité : revenus, dépendance, pouvoir d’achat
  • Identité : indépendance, compétence, mérite, place dans le monde
  • Dignité : pauvreté, échecs, dettes, erreurs

À partir de là, le silence devient un mécanisme de protection.

Le poids des inégalités rend la conversation inflammable.

Dans un monde où :

  • l’écart de richesse se creuse,
  • beaucoup vivent des difficultés économiques,
  • la justice sociale est un sujet brûlant…

… parler d’argent devient rapidement un enjeu politique ou moral. Dire “j’ai réussi” peut être mal perçu. Dire “je suis en difficulté” peut être honteux. Le tabou protège chacun de l’inconfort collectif.

Le constat est que le tabou n’est pas l’argent. Le tabou, c’est ce qu’il révèle

L’argent est un miroir. Il montre nos vulnérabilités, nos conditionnements, nos héritages, nos peurs, nos désirs et nos croyances profondes. S’il est tabou, c’est parce qu’il touche à l’essentiel, notre sécurité, notre valeur, notre identité, notre rapport au pouvoir, notre place dans la société.

Lever le tabou, c’est donc beaucoup plus qu’apprendre à gérer un budget. C’est un acte culturel, émotionnel et même politique… Se ré-approprier le droit de parler d’argent avec clarté, conscience et liberté.